I. ASSEMBLÉES ET ORGANES DE DIRECTION
L’ordonnance n° 2020-321 du 25 mars 2020 adapte les « règles de réunion et de délibération des assemblées et organes dirigeants des personnes morales et entités dépourvues de personnalité morale de droit privé en raison de l’épidémie de covid-19 ».
A. Champ d’application
Le régime dérogatoire s’applique « aux assemblées et aux réunions des organes collégiaux d’administration, de surveillance et de direction tenues à compter du 12 mars 2020 et jusqu’au 31 juillet 2020, sauf prorogation de ce délai fixée par décret et au plus tard le 30 novembre 2020 » (article 11).
Sont notamment concernés (article 1) :
les sociétés civiles et commerciales ;
les masses de porteurs de valeurs mobilières ou de titres financiers ;
les groupements d'intérêt économique et les groupements européens d'intérêt économique ;
les coopératives ;
les mutuelles, unions de mutuelles et fédérations de mutuelles ;
les sociétés d'assurance mutuelle et sociétés de groupe d'assurance mutuelle ;
les instituts de prévoyance et sociétés de groupe assurantiel de protection sociale;
les caisses de crédit municipal et caisses de crédit agricole mutuel ;
les fonds de dotation ;
les associations et les fondations.
B. Assemblées
L’ordonnance adapte les règles :
de convocation et d’information (articles 2 et 3);
de participation et de délibération (article 4 et 5) ;
des assemblées de tous types, qu’elles soient générales ou spéciales.
1. convocation et information
Les assemblées des sociétés cotées sur un marché réglementé qui n’ont pu faire l’objet d’une convocation par voie postale « en raison de circonstances extérieures » à leur volonté n’encourent pas la nullité (article 2). L’impossibilité d’accéder aux locaux ou de préparer la réunion pour des motifs sanitaires liés au coronavirus figure à l’évidence parmi les circonstances visées.
Quant à l’obligation « de faire droit à une demande de communication d’un document ou d’une information à un membre d’une assemblée préalablement à la tenue de celle-ci […], cette communication peut être valablement effectuée par message électronique », dès lors que la société dispose de l’adresse électronique du membre concerné (article 3).
2. participation et délibération
Lorsque l’assemblée a été convoquée dans un lieu rendu inaccessible, au jour de la convocation ou de la réunion, par « par une mesure administrative limitant ou interdisant les rassemblements collectifs pour des motifs sanitaires, l’organe compétent pour la convoquer ou [son] représentant légal agissant sur délégation […] peut décider qu’elle se [tienne] sans que les membres et les autres personnes ayant le droit d’y assister ne soient présents physiquement ou par conférence téléphonique ou audiovisuelle.
Dans ce cas, les membres participent ou votent à l’assemblée selon les autres modalités prévues par les textes qui la régissent [dont] la présente ordonnance ».
Il appartient à la société d’informer « par tous moyens » l’ensemble des personnes qui ont le droit d’assister à l’assemblée sur :
ses date et heure ;
et les « conditions dans lesquelles ils pourront exercer l’ensemble [de leurs] droits » (article 4).
S’agissant du calcul du quorum et de la majorité, pourront être réputés présents « les membres des assemblées qui participent par une conférence téléphonique ou audiovisuelle permettant leur identification ».
Les autres personnes qui ont le droit d’y assister pourront le faire selon les mêmes moyens techniques, lesquels doivent garantir, a minima, la « retransmission continue et simultanée » de « la voix des participants » (article 5).
Dans les cas où la loi permet que « les décisions des assemblées [procèdent] par voie de consultation écrite de leurs membres, l’organe [compétent] ou son délégataire peut décider de recourir à cette faculté sans qu'une clause des statuts ou du contrat d'émission ne soit nécessaire à cet effet ni ne puisse s'y opposer » (article 6).
Les règles dérogatoires ci-dessus valent indépendamment :
de l’objet des décisions concernées;
ainsi que des statuts ou du règlement intérieurs de la société.
Lorsque « tout ou partie des formalités de convocation de l’assemblée ont été accomplies préalablement à la […] décision » de recourir aux mesures alternatives de convocation et de participation des articles 4 à 6, l’organe compétent ou son représentant légal informe les membres de l’assemblée :
« par tous moyens » ;
suivant un délai minimum de trois jours ouvrés avant la date de l’assemblée ;
des modalités particulières de convocation et/ou de participation qui ont été décidées;
sans avoir à renouveler les formalités déjà effectuées.
Pour les sociétés cotées sur un marché réglementé, l’information doit faire l’objet d’un « communiqué dont la diffusion effective et intégrale est assurée » par ses soins (article 7).
C. Organes collégiaux d’administration, de surveillance et de direction
Les membres des organes d’administration, de surveillance et de direction « sont réputés présents » dès lors qu’ils « y participent au moyen d’une conférence téléphonique ou audiovisuelle permettant leur identification et garantissant leur participation effective ».
Les moyens techniques utilisés doivent toujours garantir la « retransmission continue et simultanée » de « la voix des participants » (article 8).
Enfin, les décisions des organes susvisés « peuvent être prises par voie de consultation écrites de leurs membres dans des conditions assurant la collégialité de la délibération » (article 9).
Ces dérogations s’appliquent quel que soit l’objet des décisions à prendre (arrêté ou examen des comptes annuels, etc.) et quelles que soient les clauses des statuts et/ou du règlement intérieur de la société.
II. ÉTABLISSEMENT, ARRÊTÉ, AUDIT, REVUE ET APPROBATION DES COMPTES
L’ordonnance n° 2020-318 du 25 mars 2020 adapte les « règles relatives à l'établissement, l'arrêté, l'audit, la revue, l'approbation et la publication des comptes et des autres documents et informations que les personnes morales et entités dépourvues de personnalité morale de droit privé sont tenues de déposer ou publier dans le contexte de l'épidémie de covid-19 ».
En bref, elle proroge :
- de 3 mois, dans les sociétés anonymes, le délai « imparti au directoire pour présenter au conseil de surveillance les [comptes annuels et le cas échéant les comptes consolidés, accompagnés du rapport de gestion y afférent] » (article 1) ;
- de 2 mois, dans les sociétés commerciales en liquidation judiciaire, le délai « imparti […] au liquidateur pour établir les comptes annuels et le rapport écrit » mentionnés par l’article L.237-25 du code de commerce (article 2);
- de 3 mois, les « délais imposés par des textes législatifs ou réglementaires ou par les statuts d'une personne morale ou d'une entité dépourvue de personnalité morale de droit privé pour approuver les comptes et les documents qui y sont joints le cas échéant, ou pour convoquer l'assemblée chargée de procéder à cette approbation » (article 3);
- de 2 mois, dans les sociétés concernées, le délai imparti pour établir les documents comptables mentionnés à l'article L232-2 du code de commerce [« une situation de l'actif réalisable et disponible, valeurs d'exploitation exclues, et du passif exigible, un compte de résultat prévisionnel, un tableau de financement en même temps que le bilan annuel et un plan de financement prévisionnel »] (article 4) ;
- de 3 mois, dans les sociétés bénéficiaires d’une subvention, le délai imparti « pour produire le compte rendu financier mentionné » à l’alinéa 6 de l’article 10 de la loi du 12 avril 2000 sur les droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.
Les prorogations ci-avant s’appliquent aux sociétés :
dont les comptes sont arrêtés entre le 30 septembre 2019 et l'expiration d'un délai d'un mois après la date de cessation de l'état d'urgence sanitaire [soit le 24 juin 2020 pour une date de cessation déclarée au 24 mai 2020] ;
sauf pour celles « qui ont désigné un commissaire aux comptes lorsque celui-ci a émis son rapport sur les comptes avant le 12 mars 2020 ».
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